Sara Singla,
ingénieure agronome
agricultrice
Intervention filmée lors du TEDxChâteauroux 2025 : Vivants ! Cité du Numérique, Châteauroux, Indre, Centre Val de Loire, le 06/06/2025
Plus d’informations sur : http://tedxchateauroux.fr
Permettez-moi
de commencer par une
question
personnelle.
Quand avez-vous
touché la terre pour la
dernière fois ?
Je vous parle
pas de marcher sur la
terre, je vous
parle de prendre une
poignée de
terre dans vos mains, de
toucher sa
texture et sentir son odeur.
Je vais vous
raconter une histoire que
vous connaissez
tous mais sous un angle
différent. Adam
et Ève. Adam en hébreu,
ça veut dire le
sol, ça veut dire
l'argile. Et ça
a donné les mots humus,
humilité et
humanité.
Et Ève, ça
signifie la vie.
Donc
littéralement, Adam et Ève ça
signifie terre
vivante.
Alors loin des
métaphores, la terre
vivante c'est
en fait une réalité qui
est sous nos
pieds. Je m'appelle Sarah
Singla, je suis
agricultrice en Avyon et
si je suis ici
ce soir, c'est pour vous
parler du sol
et pour vous parler de
techniques
agricoles dans lesquelles je
suis tombée
quand j'étais toute petite.
S'intéresser au
sol, c'est parce que le
sol, ça nous
concerne tous. Le sol,
c'est une fine
couche fragile qui fait
que quelques
centimètres à la surface de
la planète,
mais sur lequel repose toute
notre activité
humaine. Sans sol
fertile, il y a
pas d'agriculture. Sans
agriculture, il
y a pas de nourriture.
Sans
nourriture, il n'y a pas de paix.
Donc, quelque
part, travailler pour la
fertilité des
sols, c'est aussi
travailler pour
la paix dans le monde.
Et l'histoire
d'ailleurs est pleine
d'enseignement
à ce sujet. Quand vous
regardez ce
qu'on appelle aujourd'hui
l'Iran, l'Irak,
l'Égypte et la Syrie, il
y a 2000 ans,
c'était le croissant
fertile,
c'était la Mésopotamie.
Et chaque fois
qu'une civilisation a
oublié son sol,
elle a fini par
disparaître.
Même Roosevelt
l'avait dit, une nation
qui détruit ses
sols, se détruit
elle-même.
Mais je suis
pas ici ce soir pour vous
parler du
passé. Si je suis ici
aujourd'hui,
c'est pour vous donner de
l'espoir et
pour vous dire que notre
futur est
possible.
Pour la toute
première fois dans
l'histoire de
l'humanité et de
l'agriculture,
nous arrivons à la fois à
produire de la
nourriture tout en
respectant les
ressources naturelles,
l'air et l'eau,
en améliorant la
biodiversité et
en restaurant la
fertilité des
sols. En quelques mots,
nous remettons
de la vie dans les
déserts
et tout
commence le matin quand le
soleil se lève.
Là, il y a un
phénomène gratuit, propre
et silencieux
qui va se mettre en place.
C'est ce qu'on
appelle la photosynthèse.
Alors, la
photosynthèse, c'est pas cette
leçon de
biologie que vous aviez appris
sur les bancs
de l'école. La
photosynthèse,
c'est la plus belle des
inventions
naturelles.
Imaginez que
quand nous parlons de la
photosynthèse,
nous parlons de la
meilleure
technologie qui n'a jamais été
inventée et qui
existe depuis des
millions
d'années. Une technologie qui
est à la base
de toute la chaîne
alimentaire.
Même Georgie
qui était prix Nobel de
physiologie
disait que la vie c'est un
petit courant
électrique alimenté par le
soleil.
Donc le matin
quand le soleil se lève,
les végétaux
vont se mettre au travail
et là sous
l'action de l'énergie
lumineuse, il
ils vont convertir le CO2
de l'atmosphère
et l'eau en sucre. Et
tous les sucres
qu'ils auront fabriqués,
et bien ils ne
vont pas les garder
uniquement pour
eux. En réalité, ils
vont les
transférer au travers de leur
racine dans le
sol. C'est ce qu'on
appelle des
exudas racinaires.
Les exudas
racinaires, ce sont des
sucres issus de
la photosynthèse qui
vont servir à
nourrir tout un tas de
micro-organismes
tels que des bactéries
et des
champignons.
Et les
bactéries, les champignons avec
d'autres êtres
vivants qu'on appelle les
verres de terre
vont participer à la
fertilité
biologique des sols. Alors, le
rôle des verrs
de terre, ça va être de
brasser le sol,
de créer de la porosité,
de permettre à
l'eau de s'infiltrer
quand il
pleuvera trop.
Et les
bactéries et les champignons,
eux, ils vont
brasser, broyer,
déchiqueteroter
tous les résidus qu'on
avait laissés
en surface et ils vont les
transformer et
les recycler en une
nourriture qui
sera directement
assimilable par
les végétaux.
Il s'agit en
fait d'une économie
circulaire
parfaite où rien ne se perd,
rien ne se
crée, tout se transforme.
Et la nature
nous montre que le meilleur
panneau
photovoltaïque qui existe et
bien ce sont
les végétaux puisqu'ils
sont à la fois
capables de produire de
l'énergie tout
en purifiant l'air et en
nourrissant le
sol.
Et nous dans
nos parcelles et bien nous
allons nous
inspirer de la nature. La
nature ce
qu'elle fait c'est qu'elle
couvre et
qu'elle protège le sol en
permanence
comme on couvre et on protège
notre peau. On
reste pas tout nu en
plein été en
plein soleil pour avoir la
peau qui brûle
et on reste pas non plus
tout nu dehors
sous la pluie en hiver
quand il fait
froid. Et bien, nous
allons faire
pareil dans nos parcelles.
Nous allons
couvrir et protéger les sols
toute l'année.
Mais s'inspirer
de la nature, ce n'est
pas la déifier
et ce n'est pas non plus
revenir en
arrière. Bien au contraire,
nous allons
faire de l'agronomie. Et
l'agronomie,
c'est la science de
l'agriculture,
c'est aussi la science
des localités.
C'est-à-dire que les
principes
naturels, nous allons les
adapter en
fonction des conditions
pédoclimatiques,
c'est-à-dire en
fonction du
type de sol et en fonction
du climat que
nous rencontrons.
Sans oublier de
faire appel à
l'innovation et
aux dernières avancées
scientifiques.
En gros, dans
nos parcelles, ce que nous
allons faire,
c'est ce qu'on appelle de
l'intensification
écologique
où écologie
n'est pas un parti
politique.
Écologie n'est pas une
religion, n'est
pas un dogme. Mais
l'écologie
c'est une discipline
scientifique,
une science part entière.
Et intensifier,
c'est pas un gros mot.
Intensifier,
c'est une nécessité. Nous
n'avons plus le
choix aujourd'hui.
Il vaut mieux
produire 8 tonnes de blé à
l'hctare que 4
tonnes de blé à
l'hectare.
Pourquoi ? Bien
tout simplement parce
que si nous
arrivons à doubler notre
productivité à
l'hectare, cela permettra
de laisser
davantage d'espace sauvages
pour tous les
animaux.
Et faire de
l'intensification
écologique,
c'est aussi oser récolter
deux fois par
an. Vous imaginez qu'on
arrive à faire
deux récoltes par an sur
la même
parcelle et la même année ? On
va récolter du
blé en juillet qui va
servir à la
fabrication de pain ou de
pâtes et juste
après, sans labourer, on
installera une
deuxième culture qui sera
récoltée à
l'automne et qui permettra de
faire soit du
biogaz, soit des
biocarburants.
Donc, nous
arrivons enfin à produire de
la nourriture
et des biocarburants ou de
la nourriture
et des biogaz. Nous
n'avons plus
besoin d'opposer les deux
actes et tout
cela sans abîmer la
planète et tout
en restaurant les
fonction
écologique et des systèmes
agricoles.
Quelque part,
j'ai envie de vous dire
que le végétal
c'est génial
parce que le
végétal il nous nourrit, il
nous habille,
il nous permet de nous
déplacer, il
nous chauffe et en plus il
régule le
climat parce que oui, les
végétaux créent
leur propre pluie.
Végétaliser les
sols, ça veut dire faire
pleuvoir. Quand
on végétalise un sol,
que ce soit
avec des plantes ou des
arbres, et bien
ils vont faire de
l'évaporpiration.
C'est-à-dire
qu'ils vont envoyer de
l'eau dans
l'atmosphère. Cette eau va se
condenser, va
aboutir à la formation de
nuage. Et quand
il y aura un nombre
critique de
gouttes dans le nuage, alors
il se perm il
se il pleuvera à nouveau.
Deux tiers de
l'eau qui tombe sur terre
provient de
l'évaporranspiration qui est
faite par les
végétaux.
Donc c'est une
excellente nouvelle parce
que ça veut
dire que nous allons enfin
pouvoir
combattre le dérèglement
climatique au
lieu de l'aggraver et au
lieu de le
subir.
Concrètement au
Minnesota, ils ont
modifié le
climat en végétalisant
massivement les
sols. Le plateau de l'os
en Chine qui à
l'époque était un désert,
aujourd'hui
c'est devenu une vallée
fertile. Et pas
très loin de chez nous
au Sahara, la
grande muraille verte est
en train de
stopper l'avancée du désert.
Donc oui, nous
avons la possibilité
d'agir et
d'offrir un futur meilleur
pour les
générations à venir. Et il y a
d'ailleurs un
proverbe Tareg qui dit que
la principale
différence entre un jardin
et un désert,
c'est pas l'eau, c'est
l'homme. Donc
nous pouvons agir.
Mais l'eau et
l'homme ne feront pas tout
seul. En plus,
il leur faudra un autre
allié. Cet
allié, ce sont les animaux.
Parce que les
sols, les plantes et les
animaux ont
coévolué depuis de
nombreuses
années. Les animaux quand ils
sont dans les
parcelles et bien avec
leur déjection,
ils vont réensemer le
sol en
micro-organisme et ça ça va
participer à la
fertilité biologique des
sols.
Mais remettre
des animaux dans les
parcelles,
c'est pas faire n'importe
quoi, n'importe
comment. Et là encore,
on va
s'inspirer des principes naturels.
Quand vous
regardez la nature, quand
vous regardez
un troupeau de gnou,
d'antilope ou
de bison, et bien ce sont
beaucoup
d'animaux qui vont rester un
court lapse de
temps sur une petite
surface et ils
vont toujours aller en
avançant. Ils
ne font pas marche
arrière. Donc
nous, on va faire pareil
dans les
parcelles.
Avant, on
mettait une vache sur un
hectare pendant
365 jours. Elle se
promenait
aléatoirement. Elle mangeait
un peu ce
qu'elle voulait quand elle
voulait. Mais
aujourd'hui, on va garder
les mêmes
chiffres, on va garder les
mêmes mots,
mais on va les inverser.
Au lieu de
mettre une vache sur un
hectare pendant
365 jours, nous allons
mettre 365
vaches sur un hectare pendant
un jour.
Et ça c'est ce
qu'on appelle du pâturage
tournant
dynamique. Et grâce à ça, non
seulement on
améliore la productivité et
la qualité de
l'herbe, on améliore
également la
qualité du lait et de la
viande, mais
aussi et surtout on
restaure la
fertilité des sols,
des sols, des
plantes, des arbres, des
animaux et des
hommes.
Tout autour de
la planète, régénérer les
sols, c'est
notre priorité mais ça
devient la
priorité.
Parce qu'on le
dit souvent, nous
n'héritons pas
de la terre de nos
parents. Nous
ne faisons que l'emprunter
Que l'on soit
céréalier, éleveur,
maréché,
viticulteur, arboriculteur,
qu'on cultive
un petit lopin de terre ou
de vastes
étendues, nous avons tous à
cœur de laisser
un peu plus de terre sur
terre pour nous
et pour les générations
à venir.
Parce que le
sol, c'est pas de la boue,
le sol c'est de
la terre, de la terre
vivante. Merci.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire